Les Canala à l'exposition coloniale : Les Sources.

 

Lettre d'Auguste Badimoin à Emile Michaudet depuis Hambourg :

Le 3 juin 1931

Badimoin écrit à Michaudet qu'il doit faire tout son possible pour les rapatrier en France, car ils souffrent trop en Allemagne. On leur interdit de mettre des linges chauds, on leur dit aussi qu'ils doivent danser du matin jusqu'au soir sans s'arrêter.

Archives de Nouvelle-Calédonie : 1 Mi 30 R 9

CAOM : 54 APOM 4

 

 

HAMBOURG 3 JUIN 31
Cher Michaudet
Je vous annonce que depuis notre arrivée ici à Hambourg nous avons commencé à danser depuis le matin jusqu’au soir sans compter les autre jeux comme courses à pied, lancement de flèches de sagaies et de javelot, nage et aussi 4 gros et longs mats. Tous ces jeux doivent exécutés aussitôt après les danses et quand tout est terminé nous allons immédiatement à la construction des pirogues. Trois énormes troncs d’arbre que le directeur nous a ordonné de creuser peur en faire trois pirogues. Nous avons déjà fini une qui est servie en promenade aux visiteurs dans l’étang, les deux autres ne sont pas entièrement terminées sans compter d’autres d’entre nous qui sont occupés dans d’autre troncs d’arbres à tailler des figures. Un autre ordre du directeur est qu’au moment de la représentation nous devons sortir nu simplement en manou. On nous défend de sortir en pantalon et paletot et aussi avec les chaussures.
Il y a trois fois qu’il tombait de la pluie et au lieu de nous laisser reposer comme c’était à Paris il nous faisait danser quand même. Oh Monsieur si vous voyez comme on nous traite durement nous n’avons aucun moment de reposer ou laver notre linge. Tout le monde est dans une désolation complète nous regrettons notre séjour à Paris ou nous nous trouvions cent fois mieux qu’ici.
Nous vous prions de transmettre Mr Bergnier Mr Coulon et tous nos protégés calédoniens que les deux groupes rentrent encore en France pour voir l’Exposition car c’est notre désir et c’est à ce seul but que nous avons quitté volons aire ment notre pays et notre famille dans l’espérance q’on nous entourerait de soin.
Aujourd’hui il pleut beaucoup hier aussi près que une vingtaine sont enrhumés et couche au lit car nous avons dansé malgré la pluie mais le directeur vient de faire sortir d’autres pour aller faire le feu dans des hutes mal couvertes c ‘est dans ces hutes que nous restons assis parterre sans nattes ni pailles comme nous a dit le directeur pour faire croire aux visiteurs que nous sommes des sauvages et qu’il n’y a encore aucun européen chez nous .
Ce qui nous cause le plus de mal c’est la nage comme ici il fait encore plus froid qu’à Paris et le beau temps est très rare .Nous comptons sur vous monsieur ainsi qu’à vos amis de trouver le seul moyen de faire rentrer à Paris.
Je vous ai déjà écrit une lettre le mois dernier j’espère que vous l’avez déjà reçue
Présentez mes meilleurs souhaits à madame ainsi qu’à Mr et M Coulon et Bergnier
Recevez Mr Emile mes sincères salutations et l’express mes sentiment respectueux
AUGUSTE BADIMOIN